Bismillāh
فَلْيَضْحَكُوا قَلِيلًا وَلْيَبْكُوا كَثِيرًا جَزَاءً بِمَا كَانُوا يَكْسِبُونَ
Qu’ils rient donc un peu ; ils pleureront beaucoup en guise de rétribution pour ce qu’ils ont acquis.
(Sūrat al-Tawbah, N° 9, Āyāt 82)
Manquéset ci-dessus fait suite à un récit sur la façon dont certains musulmans ont manqué à leur devoir et ont choisi ce monde éphémère au lieu du sacrifice et du danger dans le chemin d’Allah ‘azza wajall. En réponse à cela, Allah leur dit de se racheter pour ces péchés en pleurant beaucoup et en riant peu. Un autre sens donné à ce verset est qu’il ne s’agit pas d’un commandement, mais simplement d’une déclaration de la réalité de ce qui arrivera à de tels pécheurs. Ils riront pour un court moment dans ce monde, mais un châtiment éternel où ils pleureront les attend. Comme ce sont les mois où la communauté croyante pleure et se lamente sur la tragédie de l’Imam al-Housayn ‘alayhis-salām, il convient de discuter brièvement des pleurs et des différents types de larmes que l’homme verse.
Comme le rire, pleurer est un comportement émotionnel propre à l’être humain. Chacun est familier avec le rire et les pleurs, l’ayant vécu lui-même ou observé chez ceux qui l’entourent. Ces deux types de comportements découlent d’un état émotionnel fort et sont tout à fait naturels. En fait, celui qui ne vide pas ses émotions en riant ou en pleurant peut être décrit comme ayant un état psychologique déséquilibré.
En examinant les récits du Prophète et de sa noble famille ‘alayhimus-salām, nous pouvons voir différents exemples de pleurs :
1) Larmes de douleur et de perte personnelle. Comme ce qui est vu chez un jeune enfant qui se blesse, quelqu’un qui perd un membre bien-aimé de sa famille, ou quelqu’un qui échoue dans une compétition. Verser des larmes dans un tel état permet aux émotions intenses de se calmer ; en le faisant, ils trouvent la paix et le réconfort. De telles larmes sont bonnes et approuvées par la religion. Dans un récit de la femme du Prophète relaté dans les Āmālī de Shaykh al-Tūsī, elle dit : « Quand [le fils du Prophète] Ibrāhīm est mort, le Prophète sallal-lāhu ‘alayhi wa-ālihi wasallam a pleuré jusqu’à ce que les larmes coulent sur sa barbe. On lui a dit : ‘Ô Messager d’Allah, tu interdis [aux autres] de pleurer et tu pleures !’ Il a dit : ‘Ce n’est pas pleurer, c’est seulement une miséricorde. Celui qui ne montre pas de miséricorde, on ne lui montrera pas de miséricorde.’ » (P. 388). D’autres récits similaires du Prophète (s) pleurant ou commandant à d’autres de pleurer à la mort de sa fille Ruqayyah et de son oncle Hamzah se trouvent dans les récits de nos frères sunnites.
2) Un type de pleurs similaire qui découle d’émotions personnelles est celui de pleurer de joie extrême. Dans un récit dont la chaîne de narrateurs comprend 10 des Imams infaillibles, il est raconté de l’Imam ‘Alī que lorsque son frère Ja‘far est revenu d’Éthiopie, comment le Prophète (s) l’a chaleureusement accueilli. Il a embrassé Ja‘far, l’a embrassé sur le front et « a pleuré de bonheur de le voir ».
3) Larmes de miséricorde versées pour autrui. Lorsque quelqu’un voit l’oppression subie par d’autres, ou la dévastation causée par des catastrophes naturelles, il est naturellement ému. Même s’ils sont à des milliers de kilomètres ou vivent des siècles plus tard, une telle miséricorde et un amour pur peuvent émouvoir quelqu’un au point de pleurer. La tragédie de l’Imam al-Housayn (a) est l’exemple par excellence d’un événement qui évoque de telles larmes. Dans un récit célèbre, l’Imam al-Sādiq (a) dit à un compagnon nommé Abū Hārūn : Quiconque récite de la poésie sur al-Houssayn (a) de sorte qu’il pleure et fait pleurer dix autres personnes, le Paradis lui est obligatoire. L’Imam continue ensuite à réduire ce nombre, jusqu’à atteindre le chiffre un. Puis il dit : Celui qui se rappelle d’al-Housayn (a) et qu’une larme de la taille de l’aile d’une mouche sort de son œil, sa récompense est avec Allah et Allah ne sera pas satisfait de moins que le Paradis pour lui.
4) Larmes pour chercher la proximité d’Allah ‘azza wajall. Dans une vision du monde islamique, la perfection ultime de l’homme réside dans sa proximité avec Allah. L’une des causes de l’atteinte de cette proximité mentionnée dans les récits et observée dans la pratique des personnes pieuses est celle des pleurs. Parfois, de telles larmes pourraient être un acte d’humilité et de crainte, par exemple lorsque le serviteur de Dieu admet ses fautes et pleure pendant la prière. D’autres fois, cela pourrait être simplement dû à la reconnaissance que l’on est coupé des niveaux supérieurs de la perfection. Lorsque le Prophète (s) est décédé, un compagnon éminent qui s’était occupé de lui enfant du nom d’Umm Ayman a été vu en train de pleurer. Quand on lui a demandé pourquoi, elle a répondu qu’elle pleurait parce que la révélation du ciel avait été coupée.
C’est à propos de ce quatrième type de pleurs que Rūmī se réfère dans quelques belles lignes de poésie, faisant également référence au verset de Sūrat al-Tawbah mentionné ci-dessus :
Jusqu’à ce que le nuage pleure, comment le jardin peut-il sourire ?
Jusqu’à ce que le bébé pleure, comment le lait peut-il commencer à couler ?
Le bébé d’un jour connaît le chemin : « Je vais pleurer, pour que la gentille infirmière vienne. »
Ne sais-tu pas que l’Infirmière de toutes les infirmières ne donne pas de lait gratuitement sans pleurs ? Il (Dieu) a dit : « Qu’ils pleurent beaucoup. » Prête l’oreille, pour que la bonté du Créateur puisse verser le lait.
Nous prions Allah de nous donner la pureté et la douceur de cœur pour que nous puissions pleurer sur la tragédie qui a frappé l’Imam al-Housayn et sa famille. Nous prions également pour qu’il nous donne l’occasion de verser des larmes en cherchant la proximité de Lui pendant la prière et que de telles larmes soient la cause de notre rectification et de notre salut.
Sources : ‘Allāmah Tabātabā’ī, Tafsīr al-Mīzān. Mahdi Pishvā’ī, Maqtal-e Jāmi‘ ; Shaykh al-Sadūq, ‘Uyūn al-akhbār al-Ridā, Ibn Qūlawayh, Kāmil al-Ziyārat ; Muslim bin Hajjāj, Sahīh Muslim.