Walain adhqnāl-insāna minnā rahmatan thumma naza‘nāhā minhu innahu layūsun kafūr
Et si Nous faisons goûter à l’homme une grâce de Notre part, et qu’ensuite Nous la lui arrachons, le voilà désespéré et ingrat.
(Sourate Hud, No 11, Āyat 9)
L’une des faiblesses de l’être humain est sa tendance à passer d’une émotion extrême à l’autre. Quand le Seigneur lui accorde une bénédiction, il devient trop enthousiaste. Son bonheur peut frôler l’extrême. S’il ne croit pas en Dieu, le bonheur peut se transformer en arrogance et en illusion d’autosuffisance. Lorsque la bénédiction est interrompue ou s’il souffre d’une affliction, il devient déprimé et perd tout espoir. Sa faible capacité intérieure le rend intolérant à la perte. Son faible niveau de tolérance ne se manifeste que lorsqu’il traverse des situations désagréables après avoir éprouvé confort et aisance. C’est ainsi que les êtres humains sont testés. S’ils sont dotés de sagesse et capables de réfléchir, ils peuvent reconnaître leurs propres incapacités. Cela pourrait les encourager à rechercher l’amélioration et la perfection, ce qui est le but de la vie.
Amīrul Mu’minīn Imam Ali ‘alayhis salām explique la faiblesse émotionnelle de l’être humain dans le Nahjoul Balāgha: Chez l’homme il y a un morceau de chair attaché à lui avec une veine et c’est la chose la plus étrange en lui. C’est le cœur. Il a une réserve de sagesse et de choses contraires à la sagesse. S’il voit une lueur d’espoir, l’empressement l’humilie et quand l’empressement augmente, la cupidité le ruine. Si la déception le dépasse, le chagrin le tue. Si la colère monte en lui, une rage sérieuse se développe. S’il est béni de plaisir, il oublie d’être prudent. Si cela devient de la peur, il devient insouciant. Si la paix s’étend tout autour, il devient négligent. (Hadith 108, traduit de l’anglais) Notons que le mot « adhaqnā » dans le verset ci-dessus signifie : Nous les laissons goûter [pendant un moment]. Cela pourrait faire référence au fait que l’être humain n’ait connu que brièvement la bénédiction. C’était juste un avant-goût de ce que pouvaient être les bénédictions et le confort. Malgré cela, il ne peut en supporter la perte.
Le verset dit que l’être humain est comme cela, faisant allusion aux êtres humains qui ne se sont pas formés pour contrôler et réguler leurs émotions. Le verset 11 de la même Sourah établit une exception concernant les personnes qui oscillent entre des émotions extrêmes : sauf ceux qui sont endurants et font de bonnes œuvres ? Ceux-là obtiendront pardon et une grosse récompense (Q 11:11) Il y a ceux qui travaillent sur eux-mêmes et dépassent ces faiblesses émotionnelles.
Ce qui aide à empêcher le soi de tomber dans le désespoir, c’est de comprendre que les bénédictions et les difficultés viennent de Dieu, en tant que moyen d’évolution pour l’âme. Ce sont des outils nécessaires qui tirent notre âme dans différentes directions. Les deux devraient conduire au renforcement des muscles de l’âme et à la purification des toxines qui la polluent. Lorsque nous réalisons que les expériences de la vie sont un exercice pour l’âme, la forme de l’âme devient l’objectif à atteindre. Les circonstances sont le moyen et non le but lui-même. C’est lorsque l’homme oublie le but et s’attache uniquement aux moyens, qu’il s’expose à la déception.
Une autre stratégie pour aider à conjurer le désespoir consiste à être reconnaissant pour toutes les bénédictions accordées. Même si une bénédiction nous a été retirée, la vie compte d’innombrables bénédictions. Nous ne les voyons pas et nous nous concentrons seulement sur celles qui manquent. Ce manque de gratitude est lié au désespoir dont parle le verset ci-dessus.
Laissons ce verset nous rappeler de ne pas désespérer en cas de malheur. Le désespoir est l’un des plus grands péchés et un croyant doit toujours être plein d’espoir et de reconnaissance. Bien que facilement affecté, le cœur peut être contrôlé par des rappels comme ce verset. Alors que nous continuons de commémorer les difficultés sans précédent rencontrées par les membres de la famille de l’Imam al-Houssayn, tirons les leçons de leur ferme détermination et de leur profonde foi en Dieu. Malgré l’énorme douleur et le chagrin rencontrés par Sayyida Zaynab bint Ali ibn Abī Tālib le jour d’Achoura, elle n’avait par la suite, jamais désespéré de la Miséricorde Divine. Elle avait plutôt plaidé auprès du Tout-Puissant, tout en tenant le corps décapité de son cher frère Imam al-Houssayn (as), en disant : Allāhumma taqabbal minnā hādhal-qurbān – O Allah, accepte de nous ce sacrifice !
Sources : Imam Ali (a), Nahjul Balāgha; Āyatullāh Nāsir Makārim Shirāzī (Ed.), Tafsīr-e Namūneh; Aghā Muhsin Qarā’atī, Tafsīr Nūr.