Réflexion coranique n° 520 : Āyat 2:183 – Un chemin intemporel vers la piété

Bismillah.

يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوا كُتِبَ عَلَيْكُمُ الصِّيَامُ كَمَا كُتِبَ عَلَى الَّذِينَ مِن قَبْلِكُمْ لَعَلَّكُمْ تَتَّقُونَ

 Ô vous qui avez cru ! On vous a prescrit aṣ-Ṣiyam comme on l’a prescrit à ceux d’avant vous, ainsi atteindrez-vous la piété

Sūrat al-Baqarah No. 2, Āyat 183

Le verset ci-dessus de la sourate al-Baqarah est bien connu et souvent cité dans le contexte de l’obligation du jeûne pendant le mois sacré du Ramadan. Il souligne deux points essentiels : le jeûne était également prescrit dans les traditions religieuses antérieures et son but ultime est de cultiver la piété (taqwā).

Pour mieux comprendre la profondeur de ce verset, examinons ses termes clés. Le mot kutiba est un verbe passif dérivé de la racine kataba, qui signifie communément « écrire ». Cependant, dans divers versets coraniques, il est utilisé comme kināyah (métonymie) pour désigner un décret divin. Par exemple, dans la sourate al-Mujādilah, verset 21 (Q 58:21), il fait référence à un commandement précis d’Allah, tandis que dans ce verset, il désigne une obligation imposée aux croyants. Le terme siyām (jeûne) provient d’une racine arabe signifiant « s’abstenir », en particulier de quelque chose de naturellement désirable. Dans son usage préislamique, ce mot dépassait le simple fait de s’abstenir de nourriture et de boisson. Par exemple, dans l’histoire de Dame Maryam (a), il lui est ordonné d’entreprendre un jeûne (sawm) sous la forme d’un vœu de silence :

فَإِمَّا تَرَيِنَّ مِنَ الْبَشَرِ أَحَدًا فَقُولِي إِنِّي نَذَرْتُ لِلرَّحْمَٰنِ صَوْمًا فَلَنْ أُكَلِّمَ الْيَوْمَ إِنسِيًّا
Si tu vois quelqu’un d’entre les humains, dis [lui :] « Assurément, j’ai voué un jeûne au Tout Miséricordieux : je ne parlerai donc aujourd’hui à aucun être humain » (Q19 :26)

Ainsi, l’essence du jeûne ne réside pas seulement dans la privation physique, mais plutôt dans un renoncement conscient aux plaisirs terrestres pour un but supérieur.
Ce verset coranique révèle également une réalité profonde : le jeûne, dans son sens plus large de maîtrise de soi, a longtemps été un chemin vers l’élévation spirituelle. L’étude d’autres traditions religieuses le confirme :

  • Christianisme : Le Carême est une période de 40 jours de jeûne, de prière et de pénitence avant Pâques. De nombreux chrétiens s’abstiennent de viande, de produits laitiers et de tout plaisir personnel pendant cette période.
  • Judaïsme : Yom Kippour, le Jour du Grand Pardon, est un jeûne de 25 heures marqué par une abstinence totale de nourriture et de boisson en guise de repentir.
  • Hindouisme, bouddhisme et jaïnisme : Ces traditions mettent également l’accent sur le jeûne comme moyen de purification, avec des pratiques telles que l’Ekadashi, le Navaratri et le jeûne rigoureux des moines jaïns.

Ces pratiques répandues soulignent que le jeûne n’est pas un simple rituel : c’est une inclination humaine intemporelle vers la discipline et la purification. Au-delà des traditions religieuses, la nature innée de l’homme confirme également cette vérité. En cherchant à s’élever spirituellement, il réalise instinctivement la nécessité de réfréner ses désirs. Le monde, avec toutes ses séductions, peut le distraire de sa véritable raison d’être. En jeûnant, il reprend le contrôle de son corps et oriente son âme vers un but supérieur. L’Imam Ali (a) décrit magnifiquement les effets spirituels du jeûne : afin d’offrir la paix à leurs membres, d’installer la peur dans leur regard, de rendre leur esprit humble, de leur donner de l’humilité dans le cœur et de les affranchir de toute arrogance. (Nahj al-Balāghah, Sermon 192). 

Le jeûne est donc un terrain d’entraînement, où le corps est discipliné et l’âme purifiée.

Alors que nous entrons dans la seconde moitié du mois de Ramadan, nous demandons à Allah de nous aider à apprécier cette opportunité divine. Qu’Il nous accorde la capacité de jeûner de manière à ce que nous puissions atteindre la maîtrise de soi, la taqwā et une véritable proximité avec Lui.

Resources: ‘Allāmah Tabātabā’ī, Al-Mīzān.